Fondateur du journal russe Novaïa Gazeta, anticonformiste, indépendant, qui dénonce sans complaisance les failles de la société russe, Dmitri Mouratov a reçu le prix Nobel de la paix ce vendredi 8 octobre avec la Philippine Maria Ressa. Le comité loue “ses efforts visant à défendre la liberté d’expression”. Félicité par le Kremlin pour “son talent et son courage”, salué par ses confrères, il entend continuer son combat, souligne la presse russe.
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— The Nobel Prize (@NobelPrize) October 8, 2021
The Norwegian Nobel Committee has decided to award the 2021 Nobel Peace Prize to Maria Ressa and Dmitry Muratov for their efforts to safeguard freedom of expression, which is a precondition for democracy and lasting peace.#NobelPrize #NobelPeacePrize pic.twitter.com/KHeGG9YOTT
Dmitri Mouratov, 59 ans, colauréat du prix Nobel de la paix, est philologue de formation. Fondateur du journal russe Novaïa Gazeta en 1993, il est, depuis 1995, son rédacteur en chef. Il était également animateur d’émissions sociopolitiques à la télévision russe entre 1997 et 2000.
Le vainqueur a dédié son prix aux six journalistes de son journal “tués pour leur activité professionnelle” entre 2000 et 2009, dont Anna Politkovskaïa, écrivait Novaïa Gazeta dès l’annonce de la décision du comité Nobel. Sous la direction de Mouratov, Novaïa Gazeta a suivi “la guerre en Tchétchénie, les problèmes de corruption en Russie et dans le monde, les violations des droits de l’homme”, rappelle le titre, avant d’ajouter que ses journalistes sont soixante fois titulaires de différents prix professionnels, dont le prix Pulitzer.
Olav Njølstad, Secretary to the Norwegian Nobel Committee, calling @mariaressa minutes before announcing her and Dmitry Muratov as the 2021 Nobel Peace Prize laureates. #NobelPeacePrize @NobelPrize
— Nobel Peace Center (@NobelPeaceOslo) October 8, 2021
📷: The Norwegian Nobel Institute pic.twitter.com/H8lKwPlvjo
Dans un entretien accordé au site russe Podiom News, Mouratov a avoué qu’il “ne s’y attendait pas” et qu’avec ce prix Nobel les journalistes de sa rédaction vont “poursuivre [le combat] pour le journalisme russe qu’on tente de réprimer et aider les gens considérés comme des ‘agents de l’étranger’ et qu’on persécute”.
“En Russie, il existe du journalisme indépendant”
Le Kremlin a, pour sa part, félicité le journaliste, par l’intermédiaire du porte-parole du président Vladimir Poutine, comme le rapporte le journal Vzgliad : “Nous pouvons féliciter Dmitri Mouratov pour ce prix Nobel de la paix : il est fidèle à ses idéaux, talentueux et courageux.”
Alexeï Venediktov, rédacteur en chef de la chaîne radio anti-Kremlin Ekho Moskvy, a confié au journal moscovite Kommersant que ce prix représente “la reconnaissance du fait qu’en Russie liberté de la parole et journalisme indépendant existent”. Il a aussi rappelé qu’aux côtés de son activité professionnelle, Mouratov est impliqué dans l’aide aux enfants atteints de maladies rares, via la fondation Kroug Dobra (“Cercle de la bonté”) qu’il a contribué à cofonder en 2021.
Troisième Russe titulaire du prix
Mouratov est titulaire de six autres récompenses : l’ordre de l’Amitié et l’Ordre de l’honneur russes, un prix international pour la liberté de la presse et celui du Comité de la défense des journalistes, la Légion d’honneur française, l’Ordre de la Croix Sainte-Marie estonien et la Plume d’or de la liberté.
“C’est le troisième Russe lauréat du prix Nobel de la paix, après le physicien [pacifiste] Andreï Sakharov et le premier et dernier président de l’Union soviétique Mikhaïl Gorbatchev”, fait observer le site russe Lenta.
"Without media, you cannot have a strong democracy."
— The Nobel Prize (@NobelPrize) October 8, 2021
Following the announcement of this year's #NobelPeacePrize to journalists Maria Ressa and Dmitry Muratov we spoke to Berit Reiss-Andersen, Chair of the Norwegian Nobel Committee, about the prize.#NobelPrize pic.twitter.com/wPxlVCVsF4
Par Alda Engoian – courrierinternational.com+ World Opinions