Chems-Eddine Hafiz, le recteur de la Grande Mosquée de Paris, se dit prêt à soutenir la démarche du chef de l’Etat contre le communautarisme qui existe selon lui dans certains territoires, à condition qu’elle s’inscrive dans une « politique volontariste et républicaine ».
Tribune. Le président de la République a choisi l’expression « séparatisme islamiste » [le 18 février, lors d’une visite à Mulhouse, Haut-Rhin] pour qualifier les manifestations de repli et de communautarisme constatées chez certains de mes coreligionnaires.
La question du « séparatisme » ne concerne en aucun cas tous les musulmans. Loin s’en faut ! Nous parlons bien d’un « séparatisme islamiste ». En tant que recteur de la Grande Mosquée de Paris, je rappelle – n’en déplaise aux milieux qui cherchent à établir un parallèle entre l’islam et l’islamisme, à ceux qui laissent croire que l’islam serait l’islamisme, et inversement – qu’il y a bien une distinction à faire entre la religion musulmane et l’idéologie islamiste.
Amalgames à éviter
La première est une foi, une éthique, une tradition, une civilisation, une histoire qui exige une herméneutique, une contextualisation, qui convoque le savoir et l’intelligence. La seconde est une idéologie mortifère, une pensée politique aux relents totalitaires, un dévoiement des textes, une menace – certains ont tendance à l’oublier – pour la stabilité du monde musulman, mais aussi pour la planète tout entière.
Un islam dirigé par des fanatiques engendre l’islamisme, car la religion musulmane, comme les autres monothéismes, est d’abord et avant tout un corpus qui, entre les mains des hommes, peut se transformer en une source de lumière ou en une source d’obscurantisme. Le premier amalgame à éviter, ne serait-ce que par honnêteté intellectuelle, consiste à ne pas laisser croire que les partisans de l’obscurantisme et de la haine de l’Autre valent les adeptes des Lumières et du respect de l’altérité.
La question essentielle qui est posée concerne le « séparatisme ». Existe-t-il véritablement sur notre territoire une volonté de se délier de la République ? La réponse est oui. Et je l’affirme sans ambages. Certains représentants de l’islam de France – comme certains responsables politiques d’ailleurs – sont très souvent dans le déni. Par calcul, par cynisme, par facilité, probablement parfois par lâcheté, un certain nombre d’acteurs représentatifs, d’élus locaux se sont refusé à voir la situation à laquelle nous faisons face aujourd’hui.