Alors que le Parti communiste chinois achevait les préparatifs de son 20e congrès, les Etats-Unis ont annoncé, le 7 octobre, de nouvelles restrictions technologiques contre la Chine, passées relativement inaperçues en Europe. Elles marquent pourtant un tournant majeur dans la rivalité sino-américaine, qui ne sera pas sans conséquences pour les Européens.
Ces nouveaux contrôles restreignent fortement l’exportation vers la Chine des semi-conducteurs haut de gamme, et des équipements et logiciels nécessaires à leur fabrication. Washington prive ainsi la Chine d’éléments indispensables au développement des technologies d’avenir, particulièrement l’intelligence artificielle et les supercalculateurs.
Après les différentes sanctions égrenées par les autorités américaines depuis les années Trump, ces mesures peuvent sembler n’être qu’une énième étape dans une liste vouée à s’allonger. Elles représentent en réalité une véritable rupture avec la doctrine des Etats-Unis depuis plus de vingt ans, par les technologies qu’elles visent mais aussi par leur nature même.
Une double rupture
Les réglementations publiées ce mois-ci par le ministère américain du commerce témoignent d’une double rupture.
D’abord elles visent un pays en particulier, la Chine, là où les régimes de contrôle des exportations depuis la fin de la guerre froide avaient tendance à cibler davantage des technologies liées aux armes (notamment de destruction massive).
D’où la deuxième rupture : elles ciblent des technologies principalement commerciales.
Ces mesures concrétisent le changement de cap annoncé le 16 septembre par Jake Sullivan, conseiller à la sécurité nationale de Joe Biden : l’objectif américain n’est plus comme auparavant de maintenir un écart technologique de deux générations avec la Chine, mais bien de maintenir « une avance aussi large que possible »… et donc d’endiguer les progrès technologiques chinois dans les secteurs-clés.
Par Mathilde Velliet – Chercheuse au programme Géopolitique des technologies – Le Monde