Plusieurs milliers de Rohingyas, réfugiés dans des camps de fortune dans le sud-est du Bangladesh ont manifesté jeudi pour marquer le cinquième anniversaire des massacres de leur peuple en Birmanie, qu’ils qualifient de « génocide ».
A grand renfort de banderoles et de slogans, cette communauté majoritairement musulmane s’est rassemblée dans le dédale de Cox’s Bazar, plus grand camp de réfugiés au monde. Nombreux en ont profité pour exiger l’abrogation d’une loi birmane de 1982, qui les a privés de leur citoyenneté dans leur pays d’origine, à majorité bouddhiste.
Ce jeudi marque « le jour où des milliers de Rohingyas ont été tués », déclare en larmes, Maung Sawyedollah, un jeune chef communautaire, en tête du cortège à Kutupalong. « Seuls les Rohingyas peuvent comprendre la douleur du 25 août », ajoute-t-il. Ce jour-là. environ 750’000 Rohingyas ont par ailleurs fui la brutale offensive, lancée par l’armée en Birmanie et ont trouvé asile au Bangladesh voisin, où se trouvaient déjà plus de 100’000 réfugiés, victimes de précédentes violences. A noter que Bangladesh refuse de pérenniser la présence de ces centaines de milliers de réfugiés.
Milliers de Rohingyas rassemblés pacifiquement
Pour cette « Journée de commémoration du génocide », des milliers de Rohingyas, pour la plupart vêtus du longyi (sarong) et d’une chemise traditionnels birmans, se sont alignés pacifiquement. Des veuves, des mères qui ont perdu leur enfants, des victimes de viols, pleurent au souvenir des horreurs subies.
« Tout ce que nous voulons, c’est un retour sûr et digne dans notre patrie », explique Sayed Ullah, un haut responsable de la communauté rohingya. « Malheureusement, nos appels restent lettre morte ». « La communauté internationale ne fait rien. Ici, dans les camps, nous moisissons sous des abris de bâches et de bambous, nous survivons à peine grâce à l’aide sociale », déplore-t-il.
En mars, les Etats-Unis ont pour la première fois reconnu que des Rohingyas avaient été victimes d’un « génocide » perpétré par l’armée birmane.
Camps insalubres
Les Rohingyas survivent, entassés dans des camps insalubres, et refusent de retourner en Birmanie, à majorité bouddhiste, tant qu’ils n’auront pas obtenu des droits de citoyenneté et des garanties de sécurité. Pour désengorger les camps, Dacca a déjà fait transférer quelque 30’000 réfugiés sur Bhashan Char, un îlot désert, aux conditions naturelles hostiles, dans le golfe du Bengale.
Le ministre des Affaires étrangères du Bangladesh, A.K. Abdul Momen, arguant de « problèmes environnementaux, sociaux et économiques » causés par l’afflux de Rohingyas, juge que « le rapatriement volontaire et durable est la seule solution à la crise ».
La Haute-commissaire de l’ONU aux droits humains, Michelle Bachelet, a toutefois prévenu la semaine dernière que « les conditions ne sont pas réunies pour les retours » en Birmanie, régie depuis l’an dernier par une junte militaire à la suite d’un coup d’Etat.
Mais les conditions sanitaires se dégradent dans les camps, selon une enquête publiée jeudi par Médecins sans frontières (MSF), où les cas de dysenterie ont augmenté de 50% par rapport à 2019 et les cas d’infections cutanées, comme la gale, explosent. Sans compter les départs de feu qui y sont fréquents, ainsi que la criminalité qui ne cesse d’y augmenter.
World Opinions / afp/fgn