La puissante centrale syndicale prend ses distances avec le président Saïed, alors que les Tunisiens sont appelés, samedi, à élire une Assemblée sans pouvoirs.
Une forêt d’emblèmes s’agite en tous sens sous le haut plafond aux lumières tamisées. Les couleurs palestiniennes se mêlent au drapeau écarlate de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT). Ce samedi 3 décembre, son secrétaire général, Noureddine Taboubi, s’adresse à ses partisans réunis au Palais des congrès, dans le centre de Tunis. Des chants syndicalistes s’élèvent de l’assemblée militante d’où fusent parfois des slogans : « Elections, mascarade ».
Les propos du patron de la très puissante centrale syndicale – forte d’environ 800 000 adhérents – dont le rôle a été déterminant dans le renversement du régime de Ben Ali en janvier 2011 – sont très attendus, guettés, alors que les Tunisiens sont invités à élire, samedi 17 décembre, une nouvelle Assemblée sur fond de négociations entre le gouvernement et le Fonds monétaire international (FMI), pour renflouer une économie tunisienne en état de quasi-banqueroute.
Avec cette future Assemblée aux pouvoirs limités, le chef de l’Etat, Kaïs Saïed, inaugure la mise en place de son modèle institutionnel issu de la nouvelle Constitution d’inspiration présidentialiste, adoptée le 25 juillet par référendum, à rebours de l’expérience parlementaire ayant suivi la révolution de 2011.
Si les déclarations de M. Taboubi sont à ce point scrutées, c’est que l’UGTT est la seule organisation en Tunisie susceptible de contrarier les plans de M. Saïed alors que les partis politiques d’opposition ne parviennent toujours pas à restaurer un crédit entaché par les errements de la décennie 2011-2021. De fait, M. Taboubi dénonce un pouvoir « peu transparent », qui « discute d’accords secrets avec le FMI ».
Trois jours plus tôt, il avait été encore plus offensif lors d’un rassemblement à la fédération des transports de l’UGTT. Le syndicat..
Par Frédéric Bobin et Lilia Blaise – Le Monde