On se réveille le matin. Dans nombre de pays, on ouvre machinalement son robinet pour boire son premier verre d’eau de la journée. Problème : pas une goutte n’en sort… Ce pourrait être le début d’un film, non pas de science-fiction, mais d’anticipation.
Entre 2000 et 2018, selon une ONG réputée, le chiffre des populations d’Afrique subsaharienne qui n’ont pas accès à l’eau et l’assainissement a doublé, et ce, en dépit des efforts des États et des bailleurs de fonds.
Au-delà du stress hydrique, la soif guette
Les forums et les colloques se succèdent, tirant la sonnette d’alarme et illustrant l’urgence de la situation. Les plans, les projets et la bonne volonté dans le déploiement des politiques publiques semblent ne rien y faire. Inexorablement, le monde s’en va vers la soif. Dans une forme immense d’indifférence… L’agriculture et l’irrigation – auto-suffisance alimentaire oblige –, la déforestation, les pollutions diverses et la concentration urbaine qui ne faiblit pas, toutes ces causes sont bien connues, analysées. Aujourd’hui, ce sont déjà 25 pays sur 54 en Afrique(s) qui sont en situation de stress hydrique. Dans 10 ans, 60 % de la population mondiale rejoindra cet effrayant club des assoiffés, selon l’ONU.
Une nécessaire organisation
On comprend cette « foire aux priorités » que sont, pour les journalistes, les chroniqueurs et analystes, le Covid-19, les questions de sécurité, de « croissance » et de redémarrage économique… mais acceptons de remettre au centre de nos énergies et de nos intelligences une organisation à même de permettre l’accès à l’eau pour le plus grand nombre. Parce que les solutions sont connues, elles existent, et la technologie continue de faire des progrès chaque jour : dessalement, réutilisation des ressources, rechargement des nappes, grands ou micro-barrages, réseaux du dernier kilomètre… : l’ingéniosité bouillonne.
Et les financiers ne sont pas en reste. Bailleurs de fonds internationaux, banques locales, fondations, et même acteurs du secteur privé motivés par des cash-flows, même faibles mais par essence récurrents, se mobilisent. En effet, comment, alors, interpréter l’alerte que l’un des premiers fonds d’investissement au monde, BlackRock, vient de lancer en citant le stress hydrique comme l’un des risques majeurs à court terme ? Pour les populations, mais aussi pour les industriels. Et ce n’est pas en Afrique mais en Allemagne que la baisse du niveau du Rhin a impacté le groupe BASF à hauteur de 250 millions d’euros en 2018…
Prendre la pleine mesure de la gravité de la situation
Si nous voulons parler d’urgence, un mot tant employé qu’il en a presque perdu son sens, alors oui, il faut se mobiliser sérieusement et de façon coordonnée pour assurer l’accès à l’eau potable pour tous, populations et industriels. Voilà l’objectif qui devrait être à l’agenda – et au premier niveau – des Afrique(s) pour 2021. C’est bien de la mise en œuvre d’une vraie volonté politique basée sur la vision – et non pas le calendrier électoral – que dépend cet accès à l’eau pour tous, source de vie et condition d’existence.
Par Patrice Fonlladosa / Le Point