Des requérants d’asile arrivant au Royaume-Uni vont être envoyés vers un centre d’immigration au Rwanda, selon un accord controversé annoncé jeudi. Le gouvernement de Boris Johnson espère ainsi dissuader les traversées illégales de la Manche, qui ont atteint des records.
« Le Rwanda se réjouit de ce partenariat avec le Royaume-Uni pour accueillir des demandeurs d’asile et des migrants, et leur offrir des voies légales pour vivre » dans ce pays d’Afrique de l’Est, a déclaré dans un communiqué le ministre rwandais des Affaires étrangères Vincent Biruta.
Cette annonce intervient à la suite d’une visite de la ministre britannique de l’Intérieur Priti Patel à Kigali.
En quête d’un regain de popularité
Désireux de regagner en popularité et séduire ses électeurs, Boris Johnson et son gouvernement cherchent depuis des mois à conclure des accords avec des pays tiers où envoyer les migrants en attendant de traiter leur dossier. Un temps évoqué, le Ghana a fermement nié en janvier dernier être en discussion avec le Royaume-Uni sur le sujet.
Dans un discours prévu jeudi dans le Kent (sud-est de l’Angleterre), non loin des côtes anglaises ou arrivent les migrants par bateaux, Boris Johnson doit détailler ses mesures pour « casser les structures des passeurs, intensifier les opérations dans la Manche, poursuivre plus de criminels en justice et mettre fin au commerce barbare de la misère humaine », selon Downing Street.
Trois fois plus de clandestins en 2021
Alors que le dirigeant conservateur avait promis de contrôler l’immigration, un des sujets clés dans la campagne du Brexit, le nombre de clandestins traversant la Manche a triplé en 2021. Quelque 28’500 personnes ont effectué ces périlleuses traversées l’an dernier, contre 8466 en 2020 et seulement 299 en 2018, selon des chiffres du ministère de l’Intérieur.
Londres financera dans un premier temps le dispositif à hauteur de 120 millions de livres sterling (quelque 147 millions de francs).
L’opposition a dénoncé « l’inhumanité » du projet. Même dans les rangs conservateurs, les critiques ont fusé. Le député Tobias Ellwood a ainsi estimé sur la BBC qu’il s’agissait d’une « énorme tentative de détourner l’attention » des déboires de Boris Johnson dans le « partygate ».
L’affaire des fêtes à Downing Street
L’annonce de ces nouvelles mesures intervient effectivement au moment où le Premier ministre est en difficulté après s’être vu infliger une amende pour avoir enfreint les règles contre le Covid-19 en participant à un rassemblement à Downing Street en l’honneur de ses 56 ans.
Le dirigeant conservateur tente de rebondir avant des élections locales en mai qui auront valeur de test pour son parti conservateur.
Une politique jugée « scandaleuse » et « barbare » par des ONG
Le projet du gouvernement britannique a suscité des réactions scandalisées, des organisations de défense des droits de l’homme dénonçant – comme l’opposition – son « inhumanité » et son caractère « barbare ».
Steve Valdez-Symonds, directeur des droits des réfugiés et des migrants d’Amnesty International Royaume-Uni, a dénoncé « une idée scandaleusement mal conçue » qui « fera souffrir tout en gaspillant d’énormes sommes d’argent public ».
Pour le directeur général de Refugee Action Tim Naor Hilton, c’est une « manière lâche, barbare et inhumaine de traiter les personnes fuyant la persécution et la guerre ».
World Opinions – AFP