Aux Etats-Unis, c’est le sprint final pour Joe Biden et Donald Trump

Avec la série « American Week », RTSinfo s’arrête chaque semaine sur la course à la Maison Blanche qui oppose le président sortant Donald Trump et son rival démocrate Joe Biden. A l’approche du scrutin, la campagne prend des airs de contre-la-montre.

Michigan, Wisconsin, Nebraska, Arizona, Floride… Le président Donald Trump, candidat à un deuxième mandat, assure jusqu’à deux ou trois meetings par jour en cette fin de campagne, des rassemblements archi-combles dont les masques sont souvent absents et qu’il aime comparer – pour s’en moquer – à ceux organisés dans le respect des règles sanitaires par son adversaire Joe Biden.

En deux mois, depuis son investiture, le républicain a assuré 47 rallyes politiques, selon un décompte du quotidien français Le Monde. A titre comparatif, son rival démocrate ne serait apparu qu’une trentaine de fois. Joe Biden a pourtant mis les bouchées doubles ces derniers temps, tout comme sa colistière Kamala Harris et son ancien patron, Barack Obama.

Le traumatisme de 2016

Car à moins d’une semaine du vote et bien que Joe Biden soit en tête dans les sondages nationaux, les démocrates redoutent la paresse des électeurs et électrices de dernière minute, obsédés par le souvenir traumatisant de 2016. Leur candidate Hillary Clinton, donnée gagnante dans les sondages et victorieuse en nombre de voix, avait alors perdu la bataille des grands électeurs face à Donald Trump.

Pour éviter un bis repetita, le parti reste plus mobilisé que jamais dans cette dernière ligne droite. Il faut dire que le camp Biden a essuyé des reproches de sa base quant à sa moindre visibilité sur le terrain. Soucieux de parler à tous les publics, des messages spécifiques ont été adressés à certaines communautés: LGBT, seniors, latinos…

Mais dans le camp d’en face, Donald Trump n’est pas en reste, courtisant l’électorat latino lui aussi, il brandit la menace « socialiste » face aux immigrés d’origine cubaine ou vénézuélienne, et cela fait mouche, en Floride notamment, un des Etats cruciaux de cette élection.

Face à son public, le locataire de la Maison Blanche s’appuie d’ailleurs sur le scénario de 2016 pour souligner que les sondages se trompent: « rappelez-vous! », aime-t-il répéter.

Un rebond économique, deux lectures

A quelques jours du vote, plus que jamais, tout est question de grilles de lecture et de sources d’information aux Etats-Unis. C’est ainsi que le retour de la croissance au 3e trimestre annoncé jeudi, après le plongeon économique du printemps, a donné lieu à des interprétations très différentes selon les candidats.

Donald Trump qui, avant la pandémie, prévoyait de fonder sa campagne sur son succès économique, a salué ce rebond sur Twitter en promettant « une année FANTASTIQUE » pour 2021. A l’inverse, Joe Biden, toujours plus nuancé, a souligné que ce rebond ne rimait en rien avec un retour à la situation qui précédait la pandémie.

Le démocrate a également précisé que ces chiffres ne réduisaient en rien la file d’attente dans les banques alimentaires. « Donald Trump est en lice pour être le premier président américain depuis Herbert Hoover à quitter le Bureau ovale avec moins de jobs dans le pays qu’à son arrivée », a-t-il balancé sur Twitter.

De George W.Bush au Boss

Mais si Donald Trump a encore des chances de gagner la présidentielle, à condition de mobiliser sa base dans certains Etats bien précis, ses gesticulations ne suffisent pas à le faire revenir en force dans les sondages, ni chez certains membres de son parti. Certains ténors ont d’ores et déjà pris leur distance publiquement, d’autres le font avec plus de discrétion. Même George W. Bush, seul président républicain encore en vie, n’a pas caché qu’il votera pour Joe Biden, sans pour autant aller jusqu’à s’engager officiellement dans la campagne démocrate.

Et à l’approche de la présidentielle, les messages se font de plus en plus limpides. Le magazine The Economist tirait ainsi « Pourquoi ce doit être Joe Biden » en une de son numéro paru jeudi, affichant clairement son parti. Quant au Boss, Bruce Springsteen, il a diffusé un message sans ambiguïté: « Nous sommes perdus. Nous avons trop perdu en peu de temps. Mettons-le dehors ».

Mobilisation élevée

Au vu de la participation au vote anticipé et par correspondance, qui dépasse déjà la moitié du total des bulletins enregistrés en 2016, avec plus de 70 millions de votes exprimés, les appels à la mobilisation ont à l’évidence été entendus. Dans certains Etats, des files d’attente de plusieurs heures ont été rapportées devant les bureaux de vote et des records battus. Au Texas, la participation avait même déjà atteint 91% de celle de 2016, à six jours de l’élection, selon les données publiées par le secrétariat d’Etat. Ce chiffre aurait même été dépassé vendredi.

Reste à savoir qui s’est mobilisé pour voter. Selon les projections, les démocrates devraient avoir été plus nombreux à se rendre aux urnes à l’avance, suivant les recommandations du Parti démocrate pour limiter les risques de contagion au coronavirus le jour J. Qu’en est-il pour autant dans le camp conservateur? Et quelle sera la mobilisation le 3 novembre de la base électorale pro-Trump, celle qu’il tente encore de rallier à grands coups de meetings ces derniers jours. C’est la principale incertitude du scrutin, alors que le nombre d’indécis paraît lui plutôt faible, à 3% de l’électorat selon un sondage de l’Emerson College.

Bataille juridique en vue

A cette inconnue s’ajoute de nombreuses interrogations sur le décompte des voix avec des délais qui varient selon les Etats. Illustration de cette inégalité démocratique aux Etats-Unis, la Pennsylvanie et la Caroline du Nord ont reçu le feu vert de la Cour suprême pour prendre en compte les bulletins de vote arrivés jusqu’à 3 jours après l’élection, respectivement 9, cachet de poste faisant foi, alors que cela a été refusé pour le Wisconsin.

Donald Trump avait d’ailleurs lui-même salué la décision prise pour ce dernier Etat sur la chaîne ABC, indiquant qu’il espérait bien qu’un résultat serait connu le 3 novembre au soir. Or, rien n’est moins sûr et cela laisse présager pour 2020 un imbroglio juridico-politique qui lui aussi pourrait bien battre tous les records.

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