Des chances infimes de sauvetage pour le submersible porté disparu près du Titanic.. Vidéos

Mercredi, des avions canadiens ont réussi à capter des sons sous l’eau, mais les recherches par sous-marin téléopéré (ROV) n’ont toujours rien donné. Alors que les réserves d’oxygène des passagers du Titan s’épuisent, la probabilité d’un sauvetage s’éloigne, même si le submersible venait à être retrouvé.

Quatre mille mètres. C’est à cette profondeur que gît depuis 1912 au large de Terre-Neuve, dans l’océan Atlantique Nord, l’épave du Titanic, après le naufrage du paquebot qui avait entraîné la mort de 1500 personnes.

C’est donc vraisemblablement à cette même profondeur que le petit submersible, parti dimanche avec à son bord cinq passagers explorer les restes du navire, pourrait se situer. Un scénario, plus optimiste, envisage une remontée à la surface et une impossibilité technique de communiquer, mais cette hypothèse n’est pas celle privilégiée par les experts.

Une pression gigantesque

A 4 kilomètres sous l’océan, la pression exercée se situe entre 380 et 400 bars, ce qui correspond à l’équivalent d’une force de 380 à 400 kg par cm2. Des conditions qui réduisent drastiquement les possibilités de sauvetage.

« S’il est descendu au fond de la mer et ne peut pas remonter par ses propres moyens, les options sont très limitées. Très peu d’engins peuvent descendre à ces profondeurs et certainement pas des plongeurs », a expliqué mercredi à la BBC Alistair Greig, professeur d’ingénierie marine à l’University College de Londres.

A cette profondeur, les recherches par sonar ont également tout d’un défi. Interrogé par le Figaro, un ingénieur officier de la Marine nationale française estime que pour que cela fonctionne, il faudrait soit que l’appareil continue à se déplacer, soit qu’il ne soit pas encastré ou masqué par la vase au fond de l’océan. « On est pas à l’abri de carthographier l’endroit où il se trouve et de passer à côté », ajoute-t-il.

Des moyens techniques limités

Si le petit submersible venait toutefois à être retrouvé dans les temps, l’opération de sauvetage ne serait pas assurée.

Plusieurs techniques ont été utilisées par le passé, mais jamais à ces profondeurs. C’est notamment le cas de la méthode  par ventilation. Dans cette technique de sauvetage, un scaphandre est dirigé par un plongeur vers le sous-marin en détresse.

A l’aide de manches à air, ce dernier peut alors apporter de l’oxygène et vider le submersible de l’air vicié avant de réussir à le faire remonter à la surface à l’aide d’un navire. Une opération qu’il est toutefois uniquement possible d’effectuer à quelques centaines de mètres de profondeur.

La technique la plus à même de réussir consiste à attacher à l’aide d’un ROV des bouées sur l’appareil afin de le faire rapidement remonter à la surface. Cette technique, dite « de renflouage », est possible à de grandes profondeurs, rappelle le Figaro. Cependant, le nombre d’engins capables de comprimer l’air à 380 ou 400 bars est très limité.

Le navire Atalante, de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer, qui s’est détourné de sa route et devrait être sur site mercredi dans la soirée, est capable d’effectuer ce type de mission. Avec le robot Victor 6000, qui peut comme son nom l’indique opérer à des profondeurs allant jusqu’à 6000 mètres, un accès au submersible serait donc possible.

Cependant, pour être un succès, il faudrait que Titan ne soit pas coincé par un obstacle. L’un des scénarios évoqué par les experts est en effet qu’il se soit encastré directement dans l’épave du Titanic, ce qui rendrait l’opération autrement plus complexe.

Un sous-marin de tourisme « artisanal »
Pour l’heure et alors que les recherches continuent, il reste impossible de savoir ce qu’il s’est véritablement passé. Les spécialistes rappellent toutefois que ce submersible n’était pas homologué. Loïc Guermeur, navigateur et ex-membre de la marine nationale française, va jusqu’à dire qu’il s’agit d’un sous-marin « artisanal ».

Dans une série d’interviews, le journaliste de CBS News David Pogue, qui a effectué une expédition à bord de l’appareil en 2022 pour voir le Titanic, confirme en partie cet état de fait. « Cela va sembler très loufoque pour beaucoup de gens, mais une grande partie de ce submersible est constituée de pièces improvisées (…) par exemple, vous le contrôlez à l’aide d’une manette de jeu Xbox », explique-t-il.

Avant d’apercevoir l’épave du paquebot, le journaliste à bord du Titan avait d’ailleurs dû essuyer des contre-temps, la mission étant annulée à plusieurs reprises à cause des conditions météorologiques ou parce que le sous-marin s’était tout simplement perdu pendant plusieurs heures à cause de problèmes de communication avec la surface.

Autre passager d’un voyage antérieur, Mike Reiss, producteur et scénariste des Simpsons, a expliqué au New York Times que lors de son expédition, le sous-marin avait été à un moment emporté par les courants, la boussole à bord du Titan allant même jusqu’à se détraquer.

Sur le site internet d’OceanGate, propriétaire du sous-marin, impossible par ailleurs de connaître avec précision les équipements de sauvetage dont dispose l’appareil. Les spécialistes ne savent par exemple pas s’il possède une bouée de localisation qui doit remonter à la surface en situation d’avarie et avertir le navire en surface de sa position.

David Lochridge, ex-dirigeant de l’entreprise Oceangate, avait lui-même été licencié après avoir émis de sérieux doutes sur la sûreté du sous-marin. Selon cet ancien directeur des opérations marines, le hublot du submersible était conçu pour résister à une pression à un peu plus de 1000 mètres de profondeur, et non 4000 mètres.

Des bruits réguliers, un espoir

Pour les spécialistes, un incident ayant conduit à une fuite du submersible reste donc possible. Si cela était le cas, les chances de survie des passagers seraient quasiment nulles.

Mais les bruits repérés par les avions de sauvetage canadiens pourraient être un signe d’espoir. Si les gardes-côtes n’ont pas donné beaucoup de précision quant à leur nature, le magazine américain Rolling Stone a expliqué qu’ils avaient été saisis de manière récurrente, ce qui pourrait donc prouver une activité humaine.

Dans le cas où Titan n’aurait pas implosé, il resterait selon les gardes-côtes américains une trentaine d’heure d’autonomie en oxygène pour les membres de l’équipage. Un véritable contre-la-montre pour les équipes de recherche qui, en cas de succès, réaliseraient sans aucun doute l’opération de sauvetage en mer la plus compliquée et la plus en profondeur de l’histoire navale.

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