Des trafiquants, soupçonnés d’avoir exploité des migrants dans des fermes au Portugal, ont été interpellés. Les documents d’identité des exilés avaient été confisqués, ils vivaient entassés dans des logements vétustes, et leurs déplacements étaient limités. Ce type de trafic d’êtres humains s’est multiplié ces dernières années dans ce pays du sud de l’Europe.
Trente-cinq personnes ont été arrêtées pour trafic d’êtres humains dans la région de l’Alentejo, dans le sud du Portugal.
« Les suspects font partie d’une structure criminelle qui se consacre à l’exploitation de travailleurs migrants, dont la plupart ont été attirés de leurs pays d’origine pour venir travailler dans des fermes de la région », a indiqué, mercredi 23 novembre, la police judiciaire portugaise.
« Les migrants travaillaient dans des conditions inhumaines avec un salaire très bas et vivaient entassés dans des habitations vétustes », a précisé une source policière à l’AFP. « Ils étaient également limités dans leur autonomie, car leurs documents d’identité étaient confisqués », a précisé cette source, qui a évoqué une opération d’une envergure « peu fréquente » dans une région qui emploie de nombreux travailleurs migrants dans le secteur agricole.
Les dizaines de victimes de ce trafic ayant pu être identifiées sont originaires de Roumanie, de Moldavie, d’Inde, du Pakistan, du Sénégal, du Maroc ou encore d’Algérie.
Les suspects, quant à eux, sont de nationalité portugaise et d’autres pays européens.
Piégé par un « agent d’emploi » à l’aéroport de Lisbonne
Ce coup de filet, préparé depuis janvier 2022, a été permis grâce à la mobilisation de quelque 400 inspecteurs de la police judiciaire, qui ont réalisé 65 perquisitions dans les communes de Beja, Serpa, Cuba et Ferreira do Alentejo.
D’après un rapport du Groupe d’experts sur la lutte contre la traite des êtres humains (GRETA), dépendant du Conseil de l’Europe, les autorités portugaises ont signalé 1 152 victimes de ce type de réseau entre 2016 et 2020.
InfoMigrants avait recueilli, en juin, le témoignage de Arjun Joshy, originaire du Kerala, dans le sud de l’Inde. L’homme qui s’était rendu au Portugal en 2019 avec un visa touristique raconte avoir été piégé par un « agent d’emploi » à l’aéroport de Lisbonne et avoir payé 1 350 € pour obtenir du travail et des papiers. Après des mois de cueillette de baies pour un peu plus de 200 € par mois, il attendait toujours ses papiers. Lorsqu’il est tombé malade, il explique avoir dû payer 800 euros de sa poche pour se faire soigner.
Les victimes de traite sont hébergées dans un refuge
Pour les agriculteurs, les travailleurs migrants sont généralement moins chers et plus simples à trouver que de la main-d’œuvre portugaise. L’essor du secteur agricole offre parallèlement des opportunités aux trafiquants, qui recrutent et exploitent des migrants vulnérables.
Le Portugal a commencé à s’attaquer au problème. Cependant, le GRETA estime que le gouvernement doit en faire davantage, notamment pour les demandeurs d’asile.
Par ailleurs, certaines personnes ne réalisent pas qu’elles sont exploitées, de par la barrière de la langue mais aussi le manque de connaissance de leurs droits. Le système portugais actuel rend l’accès à une assistance juridique très compliquée aux sans-papiers. Il faut en effet remplir plusieurs conditions, dont celle d’être en situation régulière.
En revanche, au Portugal, lorsqu’une personne est reconnue comme étant victime de traite d’êtres humains, elle est hébergée dans un refuge où, contrairement aux pratiques de nombreux autres pays, elle peut rester aussi longtemps qu’elle le souhaite. Dans ces centres, les victimes bénéficient d’un soutien psychologique et d’une aide pour accéder au marché du travail.
World Opinions – Info Migrants