A quarante-huit heures exactement des résultats du second tour de l’élection présidentielle, le Printemps de Bourges a replacé la question politique au centre d’un festival tout heureux du retour à la normale après deux ans et demi de pandémie.
La salle Pina-Bausch de la Maison de la culture était réservée, vendredi 22 avril, à une soirée intitulée « Qu’est-ce qu’on attend ! », non en référence à l’air guilleret de Ray Ventura, plutôt à la hargne de Suprême NTM. Le lieu proposait aussi une exposition organisée par la documentation de Radio France. « Engagé.e.s ! » parcourt l’évolution des chants de révolte depuis le communard Temps des cerises. En confirmant qu’après le déclin de la chanson rive gauche et post-soixante-huitarde une scène a continué, presque seule, à faire vibrer la colère : le rap.
Le risque, avec les textes à message, est souvent de faire passer la musique au second plan. L’identité du maître d’œuvre de « Qu’est-ce qu’on attend ! » l’écarte : musicien très réclamé aujourd’hui, Adrien Soleiman est capable de se fondre dans tous les genres grâce à sa curiosité. On ne le vexera pas en affirmant seulement qu’il est plus impressionnant en tant que saxophoniste que comme chanteur. C’est lui qui entre dans le vif du sujet avec Utile, texte essentiel pour Julien Clerc signé Etienne Roda-Gil (1941-2004), parolier libertaire et fils de combattants républicains espagnols. Les premiers mots posent d’emblée la bonne question : « A quoi sert une chanson si elle est désarmée ? »
Le duo Terrenoire s’est emparé du « Chant des partisans », avant que l’Occitane Mimaa s’approprie « Humain à l’eau », de Stromae
Aux côtés de Soleiman, ses complices habituels, son frère, le bassiste Maxime Daoud, le guitariste Adrian Edeline et le batteur Arnaud Biscay. Un quatuor rompu à l’improvisation, dont les membres jouent en s’écoutant. Et c’est peu dire que ça s’entend. Cette souplesse va permettre bien des audaces stylistiques, jusqu’à modifier les mélodies des chansons retenues et les coller à des rythmes inattendus.
World Opinions – Le Monde