Avec un déficit pluviométrique exceptionnel et des infrastructures insuffisantes, le département de l’océan Indien à la démographie galopante aborde la saison sèche dans des conditions très difficiles.
« Al Hamdoulilah, nous sommes sauvés ! », s’exclame l’agriculteur en chemin vers ses champs. « Nos prières ont été entendues », se réjouit-il alors que le tonnerre gronde en canons, et que la terre voit s’abattre les premières flèches d’une pluie salvatrice. Sur le sentier vite transformé en torrent boueux, Abdallah Ousseni poursuit : « On va pouvoir manger pendant le ramadan, c’est déjà ça. Après on verra. J’espère que le ciel voudra bien continuer à nous donner un peu d’eau. »
Le grand cadi de Mayotte – l’autorité religieuse suprême du territoire, rattachée au conseil départemental – avait lancé un appel le 20 mars, juste avant le début du ramadan sur cette île très majoritairement musulmane. Hamada Saanda exhortait alors les fidèles à prier pour la pluie face à « la sécheresse qui guette notre île » après une saison des précipitations largement déficitaire.
Mais ce début de ramadan pluvieux est trompeur, souligne Floriane Ben Hassen, responsable du centre météorologique de Mayotte. L’île s’apprête à vivre la pire période sèche de son histoire. « Cette toute fin de saison des pluiesest caractérisée par un climat favorable aux précipitations mais ce sera forcément insuffisant face aux déficits pluviométriques accumulés pendant la période de recharge. Il pleut en moyenne 150 millimètres en avril sur une année normale. On va peut-êtrecompenser un peu la consommation actuelle, mais on ne pourra pas créer de réserves. » La saison des pluies 2022-2023 est la deuxième la plus sèche après 1997 depuis le début des relevés il y a soixante-deux ans, constate ainsi le centre météorologique.
Le préfet Thierry Suquet, lui, évoque une « situation inédite et préoccupante ». De décembre 2022 à mars 2023, les nappes aquifères et retenues collinaires n’ont pu être remplies et sont au plus bas : les retenues de Combani et de Dzoumogné étaient fin mars respectivement à 31 % et 17,4 % de leur capacité. Soit moins de la moitié de leur niveau à la même période de 2022 où l’eau, comme tous les ans depuis 2016, manquait déjà. Face à cette situation..
Par Grégoire Mérot – Le Monde