Le 2 novembre, lors du sommet mondial sur le climat (COP26) qui se tient actuellement en Écosse, plus de 100 pays ont signé la Déclaration des dirigeants de Glasgow sur les forêts et l’utilisation des terres. Les pays signataires s’engagent « à stopper et à inverser » la déforestation et la dégradation des sols d’ici à 2030. C’est une bonne nouvelle, puisque la déforestation, deuxième source d’émissions de gaz à effet de serre, est à l’origine de nombreuses violations des droits humains.
Ce n’est pas la première initiative du genre, et bien que les accords précédents aient présenté des objectifs similaires, les pays concernés ont largement échoué à les concrétiser. Ce qui distingue la Déclaration de Glasgow, c’est l’éventail de ses signataires. La liste comprend les pays responsables des plus grandes initiatives de déforestation à travers le monde, qu’ils soient producteurs ou consommateurs de produits agricoles et de bois, parmi lesquels le Brésil, la Chine, les États membres de l’Union européenne, la Russie et les États-Unis.
S’il s’agit d’un pas dans la bonne direction, il existe un fossé entre l’engagement que ces pays ont pris à la COP26 et leurs politiques.
Aucune des grandes économies du monde n’est dotée de législations suffisantes pour restreindre l’importation des produits agricoles à l’origine de la déforestation, par exemple, bien qu’il y ait des signes de progrès en ce sens dans l’Union européenne, au Royaume-Uni et aux États-Unis. Reste la Chine, dont les importations de matières premières agricoles sont à l’origine d’un quart de la déforestation mondiale liée aux échanges commerciaux.
De nombreux pays qui possèdent les plus grandes ressources forestières du monde ont également des pratiques loin d’être exemplaires.
En Extrême-Orient russe, une gabegie et un climat plus chaud sont à l’origine cette année d’incontrôlables incendies de forêt, qui ont brûlé des millions d’hectares de forêt boréale et déclenché l’état d’urgence dans des villes rendues irrespirables par la fumée. L’exploitation forestière illégale y est monnaie courante.
Au Brésil, le gouvernement du président Jair Bolsonaro a saboté l’application des lois environnementales, publiquement plaidé en faveur des bûcherons, des mineurs et d’autres groupes qui exploitent illégalement les ressources de l’Amazonie, et cherché à faire reculer les droits des peuples autochtones sur leurs propres terres, qui font partie des forêts les mieux protégées d’Amazonie.
En République démocratique du Congo, le ministre de l’Environnement s’est engagé à lever un moratoire sur l’exploitation forestière destiné à maîtriser l’exploitation illégale de la deuxième plus grande forêt tropicale au monde. Le gouvernement avait accordé plusieurs contrats qui semblent violer ce moratoire. Cette décision pourrait conférer un avantage aux entreprises forestières, qui pourraient demander des concessions alors même que les peuples autochtones qui attendent toujours l’adoption d’un cadre juridique national qui garantisse les droits qui sont les leurs sur leurs territoires traditionnels.
En Indonésie, des progrès notables ont été accomplis ces dernières années pour freiner la déforestation, mais la mise en œuvre d’une nouvelle législation qui affaiblit les réglementations environnementales devrait avoir un impact négatif sur la déforestation et les conflits fonciers, notamment en affaiblissant les droits des peuples autochtones sur leurs terres.
Pour combler le fossé entre les promesses et la réalité, le Royaume-Uni devrait œuvrer avec les signataires à l’adoption d’un plan de mise en œuvre qui comprend des objectifs intermédiaires et des mécanismes de suivi pour contraindre toutes les parties prenantes à des résultats le plus rapidement possible. Et le gouvernement britannique devrait montrer l’exemple en adoptant une loi vigoureuse pour restreindre les importations de produits agricoles issus de la déforestation ou liés à des violations des droits. Il reste beaucoup à faire.
World Opinions / HRW