Débats. L’Algérie éliminée de la CAN : « Il faut soutenir le soldat Belmadi ».. Vidéo

 La défaite algérienne à la CAN du Cameroun, aussi amère soit-elle, démontre des dysfonctionnements qui vont au-delà de ce qui se passe sur le terrain.

Debout au milieu des tables de ce salon de thé algérois plein à craquer, l’homme se tient la tête et finit par lâcher un cri désespéré, amplifié par la foule face aux deux écrans qui retransmettent le crépusculaire Algérie-Côte d’Ivoire jeudi soir. Même si, depuis un bon moment, tout le monde avait compris que les Algériens allaient quitter la CAN du Cameroun, le pénalty raté de Riyad Mahrez à la 60e minute, alors que les Éléphants mènent 3 à 0, achève à bout portant tout espoir ; pire, cela confirme une sorte de fatalisme qui collera négativement aux Fennecs depuis le début de la compétition continentale après un 0-0 face à la Sierra Leone et une défaite (0-1) contre la Guinée équatoriale.

« Mais où est notre équipe invincible ? »

Le but d’honneur de Sofiane Bendebka (73e) ne sauvera pas grand-chose, ni le match ni le moral des millions d’Algériens sortis KO. Après l’enthousiasme des débuts et la fièvre du sacre de la Coupe arabe au Qatar. De favoris et tenants du titre, les Verts se retrouvent à la toute dernière place : 24e sur 24 équipes ! Un choc. Dans le chaos du salon de thé, où les serveurs sont bousculés par les clients quittant brutalement leurs tables pour sortir respirer ou insulter tout l’univers sur le trottoir, les phrases fusent : « Ce n’est pas possible de jouer sur des terrains comme ça », « il ne faut pas que les Africains organisent des compétitions de ce niveau », « mais où est notre équipe invincible ? », « le grigri plus fort de Belmadi », etc.

Sur le rond-point en face, deux véhicules de police stationnés et gyrophares allumés patientent en vain. En prévision d’un défilé de la victoire, la ville a été légèrement quadrillée pour éviter les débordements et les bouchons. Pas la peine.

Sur les réseaux sociaux, après la sidération malheureuse, les coups de gueule et les posts colériques, beaucoup ont hissé l’étendard de l’union sacrée. « Bravo, les gars, on se concentre maintenant sur les matchs de barrage pour la Coupe du monde au Qatar ! » écrit Mohamed alors que demain, samedi, se déroulera le tirage au sort des rencontres barrage. « Après 35 matchs victorieux, on ne peut que féliciter Belmadi et son équipe. Il ne faut pas oublier ce qu’ils nous ont fait vivre ces trois dernières années », renchérit Smaïl. « Nous n’avons pas été à la hauteur question défense et cohésion entre stars de l’équipe, nous avons perdu tellement d’occasions, mais espérons que, pour l’avenir, Belmadi engage plus de jeunes, comme Ramiz Zerrouki, et qu’il prépare au mieux ses joueurs », analyse Djaâfar.

Tebboune : « Ne baissez pas les bras »

Même du côté officiel, on se défend de lâcher les Fennecs après un tel parcours. Le ministre de la Jeunesse et des Sports, Abderezak Sebgag, a tout de suite réagi : « La défaite de l’équipe nationale, même si elle est lourde, ne va rien diminuer de sa valeur. C’est ça, le football, il arrive de perdre. En tant qu’Algériens, que ce soit le gouvernement ou le peuple, nous n’allons pas oublier tout ce que ces joueurs et le sélectionneur Djamel Belmadi ont apporté au pays ces dernières années ».

Le président Abdelmadjid Tebboune s’est mis aussi au chevet de la sélection nationale : « Une défaite sert, souvent, de leçon et constitue un motif qui catalyse l’enthousiasme et la volonté des personnes déterminées et ambitieuses de se surpasser et de faire ressortir le meilleur d’elles-mêmes… Ne baissez pas les bras… Persévérez, croyez en vos capacités et allez au bout de vos ambitions… Nous vous assurons de notre soutien et prions Dieu de guider vos pas lors de vos prochaines rencontres. »

Des soutiens sont même venus de l’étranger, comme en témoigne ce tweet de l’ex-international marocain Abdeslam Ouaddou : « C’est la loi du football. Vous avez rayonné durant trois années sur le continent. Reculer pour mieux sauter et revenir plus fort. Des échéances importantes vous attendent. Vous restez quoi qu’il arrive les Z’HOMMES ! »

Belmadi assume

Belmadi, lui, sous contrat jusqu’à la fin de l’année, fait face à cet échec avec beaucoup de sérénité. Lors de la conférence de presse après la défaite, il assume. « Je suis le premier responsable de l’équipe. Donc il est inutile de chercher des fautes aux joueurs. J’assume mes responsabilités. C’est moi qui prends les décisions, qui fais la composition de l’équipe, donc, si quelque chose ne s’est pas passé comme souhaité, c’est moi qu’il faut voir et j’assume tout ce qu’il y a à assumer », lance-t-il devant les journalistes jeudi soir à Douala.

« Ce n’est pas le scénario auquel nous aspirions. On est venus au Cameroun avec beaucoup d’ambition et de concentration pour défendre notre titre. Je dois dire que, depuis le début, rien n’a marché comme on aurait voulu, de la préparation à Doha jusqu’à notre arrivée ici, rien ne s’est passé comme prévu et nous n’avons pas été à la hauteur. Il faut le reconnaître », a ajouté le coach.

Il a tenu à garder la tête froide, même lorsqu’un journaliste camerounais lui sort cette incroyable question : « Coach, je vais aller droit au but, est-ce que ce n’est pas l’esprit d’Albert Ebossé qui a hanté les Fennecs pendant toute cette CAN ? » Albert Ebossé, joueur camerounais qui évoluait au sein du club algérien de la JS Kabylie, est décédé en août 2014 à la suite d’un jet de pierre qu’il l’a atteint en pleine tête à la fin d’un match… Belmadi, estomaqué par la question, ne sait quoi répondre et lâche, en maîtrisant sa colère face au journaliste : « Je ne sais pas qui vous a autorisé à entrer dans cette pièce, monsieur, mais c’est une faute professionnelle. » Belmadi n’avait décidément pas besoin de ça.

« Belmadi a fait face à un très mauvais alignement des planètes », estime Nazim Bessol, auteur, animateur du site de référence footafrique.com et directeur du journal algérien Botola. « En termes de préparation, les Verts n’ont eu droit qu’à un seul match amical [avec le Ghana, NDLR], celui avec la Gambie ayant été annulé. Les aléas du Covid ont beaucoup déstabilisé les plans de préparation des Algériens. Il a aussi été privé, au début de la CAN, de son précieux ami et entraîneur adjoint Serge Morano, pour cause de Covid », explique l’expert.

Parasitage

D’autres éléments ont également handicapé les Fennecs lors de cette CAN. « En tant que favori, tout le monde t’attend. Il y a une pression à gérer. Toi, tu t’épuises sur un terrain – très mauvais – juste pour dominer le jeu alors qu’en face il leur suffit d’attendre l’unique occasion du but qui tue. Ce n’est pas un tournoi de grandes équipes, il suffit d’avoir des éléments très bons qui créent la surprise. C’était notre cas en 2019 lors de la CAN en Égypte, on ne nous attendait pas.

C’était le cas de la Zambie quand elle remporta la Coupe d’Afrique en 2012 aussi », analyse encore Nazim Bessol. « Ajoutez à cela le facteur très important du doute : on joue deux matchs et on rate tellement d’occasions que ça travaille sur le moral des joueurs et du staff. Le raté de Mahrez lors du pénalty jeudi a été l’apogée de ce défaitisme. On y croit plus. C’est fatal », conclut le journaliste.

Mais au-delà des aléas purement sportifs, il semble que Djamel Belmadi ait subi d’autres pressions. Une source au sein de la Fédération algérienne de football (FAF) reconnaît que le coach des Verts « a été malheureusement sorti du terrain pour être parasité par les dysfonctionnements politiques de la fédé ».

« Laissez-moi serein pour travailler »

« Djamel a une qualité incroyable : il dit aux dirigeants du sport algérien qu’il a une obsession, la stabilité des instances du football et le maintien de sa bulle de coach loin des soucis bureaucratiques ou de pouvoir », témoigne un connaisseur du dossier. « Belmadi répète, supplie même, qu’il veut se consacrer à 100 % à sa mission d’entraîneur, être avec ses joueurs à fond et ne penser qu’à ça.

Mais il se retrouve impacté, à cause des problèmes au sein même d’une fédération qui se cherche, par des questions complètement subsidiaires, qui le parasitent : l’état des terrains en Algérie, la disponibilité des tests PCR pour ses éléments, la gestion des billets d’avion, l’ego de tel ou tel responsable du football local… » témoigne une source. « Il n’en peut plus. Son staff et ses joueurs le ressentent, ça les touche, négativement, et cela crée une ambiance peu propice à la sérénité, un mot clé que Djamel ne cesse d’acclamer. “Laissez-moi serein pour travailler ! » » Or, il ne l’a pas été cette CAN : il a joué avec quasiment trois équipes différentes », poursuit-on.

Et maintenant ? « Il faut espérer que l’entrechoc de la CAN produise quelque chose, non seulement chez les joueurs, mais surtout chez les dirigeants du football algérien », espère un ex-responsable de la FAF. Et de conclure : « Laissez Belmadi travailler, et faites une fois pour toutes le ménage là où il faut, cessons de parler frais de mission, avantages et carrières pour les bureaucrates du sport et pensons à l’essentiel : le sport et la victoire ! »

World Opinions / agences

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