En plus des ressortissants français des Afghans menacés par les talibans sont évacués peu à peu vers la France. C’est le cas de Jamail, une jeune femme de 32 ans qui travaillait comme interprète et assistante pour les journalistes français à Kaboul.
Elle s’appelle Jamail et dispose enfin d’un peu de temps pour elle, pour se poser, dans l’hôtel où elle est accueillie avec beaucoup de familles. On entend des enfants quand on lui parle au téléphone. Elle raconte une course contre la montre qui commence lorsque l’ambassade de France l’appelle en urgence : « J’ai reçu un appel de l’ambassade, ils m’ont demandé de venir aussi vite que possible le jour où les Talibans sont entrés dans Kaboul. »
L’ambassade l’appelle car elle a fait une demande de visa. À ce moment-là, les talibans n’ont pas encore pris le contrôle de Kaboul. Elle en croise sur la route, sur des checkpoints mais arrive à entrer dans l’ambassade.
« Nous avons vu des foules immenses qui étaient bloquées par les checkpoints des talibans. »Jamail
à franceinfo
« Nous avons été bloqués à l’intérieur pendant trois jours car les talibans encerclaient l’ambassade, raconte Jamail. On ne pouvait pas sortir. À l’extérieur, des centaines de personnes essayaient d’entrer pour fuir le pays. Je n’ai presque rien pu emporter avec moi, seulement mon téléphone et mon passeport. »
Après trois jours dans l’ambassade, elle raconte l’évacuation à bord du bus vers l’aéroport : « Je crois que six autocars sont arrivés de l’extérieur, des cars blindés. Des militaires français armés étaient là aussi, et nous avons roulé vers l’aéroport international de Kaboul. Ils nous ont fait passer par une route différente pour rejoindre la base de l’Otan. »
Les talibans contrôlent tous les accès à l’aéroport
Et la route a été difficile, avec de nombreux checkpoints des talibans : « À chaque checkpoint, ils nous arrêtaient pendant 20-25 minutes. Dans mon car, les talibans entraient et nous posaient des questions comme ‘où allez-vous ?’ Je ne répondais pas car j’avais peur et parce qu’ils ne parlent pas aux femmes. À un moment, un ami m’a demandé de parler à un taliban car je parle pachtoune. Je lui ai dit ‘s’il vous plaît, laissez passer cette famille, ils travaillent pour l’ambassade.’ Le taliban m’a hurlé dessus. ‘Je ne réponds pas à une femme ! Qui vous a dit de me parler ?’ Il m’a crié dessus 3, 4 fois. »
Jamail et ses amis réussissent finalement à quitter Kaboul à bord d’un premier avion jusqu’aux Émirats puis d’un second, jusqu’à Roissy : « Ils nous ont fait un test Covid. Nous sommes restés plusieurs heures à l’aéroport pour les procédures d’immigration aussi. Et puis nous avons pris un bus jusqu’à l’hôtel. » Elle se dit soulagée d’être enfin à l’abri : « Tout se passe très bien ici. Ils prennent soin de tout le monde. »
« Si j’étais en danger face aux talibans, ma famille l’est aussi. »Jamail
à franceinfo
« Je suis très inquiète pour ma famille, qui est toujours à Kaboul », confie toutefois Jamail : « La nuit dernière, je n’ai pas réussi à dormir. Si j’étais en danger face aux talibans, ma famille l’est aussi. Ma soeur est une joueuse de football pour l’équipe nationale, elle travaille comme ingénieure pour l’Onu. Je regrette d’être venue sans eux. »
Elle ne pense donc qu’à faire venir sa famille en France. Mais un jour, si la situation le permet, elle veut repartir travailler en Afghanistan.
Par Maxime Tellier – France Info