Le président et le Premier ministre de l’autorité de transition au Mali ont été emmenés, sous la contrainte, dans un camp militaire ce lundi. Ce coup de force survient neuf mois après la démission forcée de l’ancien président Ibrahim Boubacar Keïta.
Coup de force.
Neuf mois après le dernier coup de force, survenu en août dernier, le Mali vit une nouvelle période trouble. Lundi, des militaires ont arrêté le président Bah Ndaw et le Premier ministre Moctar Ouane, responsables des autorités de transition, avant de les amener sous la contrainte au camp militaire de Kati. Certains de leurs collaborateurs ont également été conduits dans cette structure, à proximité de Bamako. Dans un échange téléphonique avec l’AFP, le Premier ministre a confirmé avoir été emmené par des militaires, citant « les hommes de Goïta » avant l’interruption de la conversation.
Qui est à la manoeuvre?
Dans son appel, Moctar Ouane évoque le nom du colonel Assimi Goïta, vice-président de la transition. Homme fort du Mali, le militaire était à la tête des putschistes qui avaient conduit l’ancien président élu Ibrahim Boubacar Keïta au même camp de Kati pour annoncer sa démission, avant de prendre le pouvoir en août 2020. Lundi, il semblerait que les mêmes hommes soient à l’initiative de ces arrestations, mais leurs intentions ne sont pas encore connues.
Pourquoi ce coup de force? Après le coup d’Etat d’août, le quatrième du pays depuis son indépendance, un gouvernement de transition avait été installé, représenté par un civil, Moctar Ouane, et un militaire retraité, Bah Ndwa. Face à la contestation nationale, le précédent gouvernement provisoire formé par les deux hommes avait été contraint à la démission il y a une dizaine de jours et une nouvelle équipe avait été annoncée lundi. C’est la composition de ce nouvel exécutif qui aurait mécontenté les militaires, car deux figures emblématiques de l’ancienne junte ont perdu leurs portefeuilles respectifs : celui de la Sécurité et de la Défense.
Quels sont les enjeux?
Cette nouvelle composition, écartant des figures putschistes, peut être interprétée comme un gage de bonne volonté afin de respecter le calendrier de transition prévu. En effet, le 31 octobre prochain, un référendum sur une révision constitutionnelle doit se tenir, avant des élections présidentielles et législatives en février-mars 2022. A l’issue de ces scrutins, les autorités de transition doivent rendre le pouvoir à des dirigeants civils élus. Les autorités militaires estimaient dans un premier temps à trois ans le délai nécessaire avant de passer la main, mais il a été ramené à 18 mois, sous pression internationale. Le coup de force de lundi pourrait bousculer ce programme, d’autant que le pays doit composer avec d’autres troubles : violences djihadistes et intercommunautaires, contestation sociale.
Comment a réagi la communauté internationale?
Dans un communiqué commun, la mission des Nations unies au Mali, la Communauté des Etats ouest-africains (Cédéao), l’Union africaine, la France, les Etats-Unis, le Royaume-Uni, l’Allemagne et l’Union européenne ont manifesté un soutien « ferme » aux autorités de transition et rejettent par avance une éventuelle démission forcée. Sur Twitter, Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU, a appelé à la libération des deux hommes politiques et au calme. Selon des sources diplomatiques, citées par l’AFP, un médiateur de la Cédéao est attendu mardi à Bamako.
World Opinions – AFP